À l’occasion des 6 ans des Gilets Jaunes, nous avons recueilli des témoignages de Gilets jaunes du Mantois, pour faire un bilan des réussites, des échecs, et de ce que ce mouvement a signifié pour ceux qui l’ont fait vivre. Certains ont répondu à des questions que nous avions posées, d’autres ont écrit plus librement. Nous remercions chaleureusement les camarades GJ qui ont répondu à notre appel à témoignages, et invitons toute personne qui souhaiterait y contribuer à nous contacter.
Nous publions les témoignages volontairement sans aucune modification ni commentaire. Une analyse plus approfondie, publiée ultérieurement, permettra de mettre en regard ces témoignages avec notre propre expérience.
– Pourquoi, quand et comment as-tu rejoint le mouvement ?
Je ne me suis jamais retrouvé dans les organisations politique classique que ce soit les partis politiques ou les syndicats quand j’ai vu les appels pour le 17 novembre qui était relayé et semblait suivit par beaucoup de citoyen j’ai été curieux et j’ai été sur le péage de mantes la jolie le 17 novembre voire comment ça se passait. C’était de la curiosité et un peu l’espoir d’avoir un changement car j’observait les problèmes de la société mais je ne voyais pas en quoi on pouvait changer les choses.
– Quel était ton engagement dans celui-ci ?
Au début j’ai beaucoup observé en venant régulièrement et en apportant du ravitaillement et en faisant connaissance avec les personnes présentes. C’est à partir du moment où le camp de Buchelay c’est monté que j’ai commencé à vraiment participer en prenant parfois la parole pendant les réunions. J’ai participé a quelque manifestation mais plus par curiosité pour voir comment ça se passait car je n’ai jamais cru que ça allait changer quelque chose de se réunir dans la rue pour montrer notre mécontentement.
– Qu’est-ce qui t’a plu ou à l’inverse déplu dans les GJ ? Quelles étaient selon toi les forces et les faiblesses du mouvement ?
Ce qui m’a plus dans se mouvement c’était sa spontanéité, il n’y avait pas l’immobilisme et la bureaucratie que je voyais dans les partis politique ou syndicats qui prétendais vouloir améliorer la vie des français mais qui pensais plutôt à conserver leur situation favorable.
La force du mouvement était son nombre et son ouverture à tout le monde. La plus grande faiblesse a été son incapacité à désigner des représentant/responsable /chef. On était tous légitime à agir mais comme tout le monde pouvait le faire souvent personne n’agissait. A chaque fois que j’abordais le sujet d’élire un responsable local pour représenter le camp on rejetait en bloc cette idée car les trahisons successives des élus ont profondément traumatisé les gens et ils refusaient d’avoir un représentant de peur de se faire trahir. J’ai toujours trouvé ça dommage qu’on ne puisse pas appliquer a nous-même ce qu’on demandait comme changement politique, à l’époque le RIC était un sujet très présent. Sans cohérence d’action et d’organisation nous étions très limité et avons fini par tourner en rond.
– Quels sont tes souvenirs les plus marquants de cette période ?
Le traitement médiatique complètement déconnecté de la réalité du terrain, c’était déjà le cas à l’époque et quand on voit comment les média aborde les sujets actuellement c’est encore pire.
– Si c’était à refaire, tu ferais quoi pareil ou différemment ?
Je pense que j’insisterais plus sur le besoin de se structurer pour gagner en efficacité mais les défauts des gilets jaunes font partie intégrante du mouvement et c’est en faisant des erreurs qu’on apprend, c’est pour ça qu’il est facile de critiquer avec du recul mais que les erreurs commises ont fait partie de la construction du mouvement.
– Quelles traces penses-tu que le mouvement a laissées, chez toi, en France, et pour ceux qui se battent pour changer cette société ?
Je ne me sent pas légitime pour parler de l’impacte que le mouvement à eu sur la France, pour moi et ceux qui se battent pour changer la société je pense que ça a redonné un peu d’espoir en montrant qu’ils n’étaient pas seul à vouloir que les choses changent. Ca n’a pas eu l’impact qu’on espérait dans le sens où ça n’a pas aboutis sur des réformes structurelles qui permettrais un plus grand investissement citoyen dans la démocratie mais ça permis de faire se rencontrer des personnes qui ne se serait pas rencontrer sans cela.
Alexandre G.
En 2018, à l’annonce de la taxe des carburants par le gouvernement macronisme pour financer l’écologie, je me suis dit : «la blague !!! » « ils nous prennent vraiment pour des cons ! »
Très vite un appel est lancé sur les réseaux afin de bloquer les axes routiers et les axes giratoires pour protester contre cette taxe le 17 octobre 2018
L’appel était lancé et commençait pour moi 4 ans de lutte citoyenne acharnée avec mon gilet jaune.
Qui aurait cru que ce mouvement spontané tiendrait aussi longtemps et ferait trembler le pouvoir.
Le 24 octobre un camarade diffuse une vidéo sur les réseaux et propose comme symbole de mettre en évidence le gilet jaune dans les voitures pour se rendre visible. Il finira sur le dos en manif de tous les gilets jaunes « notre bannière personnalisée par chacun ». « Plein le dos » journal photocopies des gilets jaunes personnalisés sur papier jaune sera distribuer lors des manifs. « On avait de la gueule avec nos GJ » au son des tambours.
En novembre 2018 la pétition de Laetitia LUDOSKY qui devient une des figures des GJ, dépasse plus d’un million de signatures : « Ah ! Macron commence à nous prendre au sérieux »
Du rondpoint au camp :
Mon premier contact est un bol de soupe bien chaude fait maison que m’offre une camarade GJ « mamie soupe » près du feu. Je ne connaissais personne mais j’avais ma place.
Déloger par les flics à plusieurs reprises des ronds point, notre groupe s’installe sur un terrain privé et une cabane est construite. Mais ils ont fini par la brûler. « Un camp de GJ, ça faisait tache à côté du nouveau centre commercial !!! » J’ai pleuré ce jour-là…
C’était le lieu par excellence de discussion, des AG des engueulades, des infos, de rencontre avec d’autre groupe, l’organisation du camp, des actions et les manifs. C’était ouvert à tous et toutes, mais nous ne voulions pas d’étiquette politique ni syndicale, pas de leader, nous ne voulions pas être utilisés. La collectivité s’organisait autour de la solidarité et de l’entraide. Les grandes décisions étaient prises en commun.
Dans ce groupe hétéroclite où se côtoyait gens de quartier, des campagnes, intellectuels, des militants de longue date, des vieux, des jeunes, des salariés, des syndicalistes, des sans travail, des gens dans le besoin, s’organisait la lutte autour de la justice sociale, fiscale, peu après écologique. Petit à petit, nous réorganisions une vie plus juste de la cité et quels moyens ont pouvait créer pour être entendu par le pouvoir.
Nous apprenions des uns des autres, une véritable éducation populaire s’instaurait. C’était d’une richesse, nos débats parfois houleux, les conférences, les réunions autour de la constitution (merci au maire sans étiquette d’accueillir en salle du conseil gracieusement), histoire des révolutions de 1789 de 68 la commune de Paris sans oublier le fonctionnement des institutions politiques.
Une prise de conscience douloureuse pour ma part quant à La constitution de 1958 avec sa devise « Liberté égalité et fraternité » et son principe » gouvernement du peuple par le peuple pour le peuple » s’avère une vaste fumisterie.
Il nous fallait donc changer la constitution pour une démocratie directe. Le referendum d’initiative citoyenne (RIC) s’est imposé comme une évidence avec ses 4 modalités : référendum législatif révocatoire abrogatoire et constitutionnel pour redonner la voix au peuple.
« Ça débâtait dur au camp ! il y avait de l’espoir ! »
« Eh oui ! Les GJ faisaient de la politique ! Ne vous en déplaise ! »
Les manifs du samedi s’élargissaient à d’autres cause la loi sécurité global, le climat, loi sur l’immigration, soutien à la LDH, la réforme des retraite, contre les violences policières, contre l’islamophobie, contre le racisme, Soutien à Christophe Dettinger : le boxeur qui défendait une femme a terre violentée par un CRS, à Moune notre repère aux manifs du samedi avec son parapluie arc en ciel arrêté injustement, soutien aux éborgnés au nombre de 30 dont Jérôme Rodrigues sans compter les amputés, des rassemblements sur les lieux de pouvoir et devant le siège des médias comme BFM dégagé des manifs, les 150 de la commune, les 1er mai et bien d’autre… « La naissance du Wokisme ?»
Nous côtoyons des avocats, des médias indépendants, des politiques, des personnalités connus. Je me sentais importante avec mon GJ et reconnue.
Les manif GJ, Ah c’était quelque chose ! Après l’appel du 18, je suis de toutes les manifs du samedi. De ma banlieue je prends le train jusqu’à Saint Lazare et là je suis le mouv… En Manif GJ tu n’es jamais seul. Les manifs n’étant pas déclarées ni organisées, je ne savais jamais où j’allais me retrouver et avec qui. Je chopais les infos sur les réseaux et échanger avec mes camarades que je rencontrais sur ma route pour connaître sur le lieu de rendez-vous. Je n’ai jamais autant marché en discutant pour un monde plus juste. Je croisais des GJ dans tous Paris. Prêt de l’hôtel de ville un touriste nous a même pris en photo.
Très vite l’objectif du samedi était les Champs Elysées On allait chez les riches, chez eux.
Le 1er décembre certains GJ prennent le rondpoint des champs. Les flics les bloquent et là c’est violent. Moi je suis bloquée sur les champs gazée, aveugle, tout mon visage me pique, le nez s’est insupportable je tousse je vomi, impossible de sortir, tous les magasins nous ferme la porte. J’évite le canon à eau grâce à un jeune qui me pousse vers une porte cochère. Un enfant en larme et sa mère nous accompagnent, un vigile finit par leur ouvrir la porte du magasin.
Avec d’autres je me réfugiais dans une rue adjacente pour sortir du brouillard gazéfié. Et là tu avais les bourgeois au restau qui te regardaient apeurés et ceux qui pressaient le pas on se refugiait dans leur halle d’entrée quand tu voulais juste savoir où se trouvait le métro pour rentrer. Là, j’ai pris pas compris qu’ls ne soutiennent pas et j’ai pris conscience du fossé qui nous sépare.
C’était peu avant le 22 décembre, le jour ou à Macron a eu peur du peuple… « Emmanuel Macron président des patrons, on vient te chercher chez toi »
Nous étions pacifiques mais très vite face à la violence d’état, il a fallu que j’apprenne à me protéger.
Je me rendais en manif en covoit avec les GJ du camp, nous veillons les uns sur les autres. Je ne pensais pas être en danger en manifestant en France.
La bourgeoisie craignait les « gueux » et les flics étaient débordés par l’ampleur du mouvement sans leader et sans organisation. La répression des plus violente s’en suit : les éborgnés, les amputés, les LBD, les grenades de désencerclement, les drones, la mort de Zineb, les amendes, les gardes à vus les comparutions immédiates les incarcérations, la nasse, les fiches S, le gaz de plus en plus nocif, le canon à eau, les coups de matraque, les manifs déclarer annuler à la dernière minute. Les voltigeurs remis au gout du jour : la BRAV-M de Lallemand, la milice d’état sans pitié. La mort d Malik Oussekin était oublié. Les femmes, les personnes âgées, les handicapés…tout le monde y passait. On a même eu droit aux blindés de la gendarmerie. J’ai été visé par un LBD en allant récupéré un camarade plus âgé, le flic n’a pas tiré j’ai eu de la chance. On s’est regardé dans les yeux. Je garde en mémoire le regard du flic qui me visait avec son LBD. « Les blancs » subissaient la violence policière, ça n’arrivait pas que dans les quartiers !!!
Face à cette violence d’état les GJ s’organisent et s’entraide.
« On ne lâche rien ! » « On est déter » « Macron démission » « on est là »
Les médics apparaissent pour soigner, la légalteam pour nous défendre face à la justice d’état. Un des nôtres est à terre blessés on le protège de nos corps mains levés en criant Médic blessé, quand un des nôtres est frappés ou embarqués par les flics on s’interpose on hurle, on insulte on filme. On s’informe sur nos droits en GAV. On se protège : masque de plongée, masque, dacrylo-sérum, respirer par la bouche pour le gaz, du sucre de l’eau, portable prépayé et numéro de l’avocat désignés par la légalteam écrit sur le bras, ne pas courir en manif, vêtements sombres pour qu’on ne puisse pas nous identifiés.
De mémoire, les manifs sur les champs sont moins fréquentes à partir du 16 mars 2019 ou les flics ont cramé le Fouquet. C’était chaud et extrêmement violent des deux côtés, saccage des magasins, symbole du capitalisme, affrontement avec les forces de l’ordre, voitures brûlées avec les slogans « révolution » « anti ! anticapitalisme » « Castaner en prison » « tout le monde déteste la police » au rythme du tambour des GJ.
Les slogans en manif s’étoffent avec la présence des anti-fa et du bloc. Un lien était fait entre notre misère notre exploitation par les puissants et leur mépris, les insultes des bourgeois et le capitalisme.
« Siamo tutti antifaschisti »
Sur les murs : « ça c’est une bourgeoisie qui se tient sage » « La faim de leur monde » « Carlton pour tous » …
Les manifs finissent par être déclarées et autorisées hors les champs Elysées, parcours traditionnel place d’Italie, nation, bastille ou république. Et puis il y a eu le covid et le confinement. Ça a mis un frein au mouvement. Les manifs reprennent, nous étions encadrés par des lignes de CRS pour éviter toutes manif sauvage. Les flics fouillaient nos sacs nous prenait nos lunettes de plongée et nos masques.
Nous déambulions dans Paris et la réaction des Parisiens étaient vraiment choquante, assis sur leur terrasse de café barricadée ils nous regardaient comme des pestiférés. Du coup un camarade a accroché le signe des cagots sur son GJ refusant la vaccination COVID et surtout face à la réaction de rejets des vaccinés. Tous les GJ n’étaient pas contre la vaccination, chacun était libre de ses choix et on se respectait. Pour ma part j’étais une « cagote »
Les parties politiques et les syndicats ont tous tenté de récupérer le mouvement. Au début ils nous regardaient avec dédain et mépris. Puis vu l’ampleur du mouvement, à l’approche des présidentiels ils se sont dit tiens des électeurs ou adhérents potentiels. Les fascistes ont été vite dégagés du mouvement mais malheureusement notre mouvement se divisait sur des positions idéologiques et des guerres d’egos.
Quant au syndicat, il se pensait plus légitime que nous de porter la révolte du peuple. Le service d’ordre de la CGT a gazé et matraqué des camarades. Comment lutter avec des syndicats qui utilise le s même méthode que la milice d’état. La convergence n’était pas possible. Je me souviens d’une manif ou nous étions placés devant. Les flics ont chargé et nous ont gazé on s’est retourné il y avait plus de syndicats il avait disparu nous laissant nous faire matraquer.
Je dois rester juste, tous les syndicats n’avaient pas la même attitude. Je remercie solidaire et la FSU qui nous ont aidé et soutenu.
La montée de l’extrême droite s’en ressentait.
Les manifs de Philippot qui rassurait les gens, pas de flics, pas de débordement. Comme s’est étonnant !!!
En 2021 la manifestation du syndicat Alliance Rn avec la présence du ministre de l’intérieur Darmanin et les représentants politiques de gauche marquait un tournant. « Hallucinant la gauche avec des fascho ! »
Lors de la manifestation antiraciste de 2022 ou 23, peu de gilets jaunes ont participé. Je demandais à mes camarades mais ils sont ou les GJ ?
Le convoi de la Liberté était également un signe de la division des GJ. J’ai entendu des propos ouvertement racistes avec ma camarade et amie aujourd’hui nous avons réagi et nous avons préféré rejoindre le rassemblement contre les violences policières du collectif « Vérité pour Adama ».
Le mouvement se scindait en deux, je continuais à me rendre en manif mais moins régulièrement avec les GJ antiraciste et les antifa.
Le 22 avril réélection de macron avec 143 sièges pour l’extrême droite au parlement et l’avalanche des 49.3 de Borne. Ça m’a achevé, je comprenais plus après tout ce qu’on avait vécu…
Le 1er mai 2023, manif contre la réforme des retraites, a été pour moi le temps d’arrêter. J’ai vraiment eu très peur. Les flics étaient particulièrement hargneux, il chargeait sans raison et çà tirer dans tous les sens gaz et grenades de désencerclement…
Le mouvement s’est peu à peu essoufflé. Les GJ ont fait trembler le pouvoir, la bourgeoisie a eu peur des fourches des « gueux ». Elle a mis les moyens financiers, organisationnels et répressifs avec la complicité des médias mainstream et de la justice pour museler les oppositions, garder leurs avantages, continuer à s’enrichir sur le dos du peuple mais surtout nous diviser.
Les GJ ont marqués l’histoire, mais nous n’avons pu su nous rallier sur une valeur fondamentale l’internationalisme et pour cela il aurait fallu aborder l’idéologie du colonialisme, pétainiste qui dégagent des relents d’un suprématisme blanc qui ressurgie bien vivant aujourd’hui.
L’extrême droite est aux portes du pouvoir par un vote d’adhésion avec comme bouc émissaire l’émigré et le musulmans, La France finance une guerre et est complice d’un génocide, on ne pourra pas dire qu’on ne savait pas. Nos droits s’amenuisent à vue d’œil et nous sommes de plus en plus taxer et de plus en plus pauvres. Ça rappelle une certaine période de notre histoire.
J’aime à croire que la flamme de la révolte n’est pas éteinte et qu’elle peut à nouveau se raviver à nouveau, autrement pour une société plus juste, un monde en paix ou nous pourrions vivre dignement de notre peine quel que soit nos origines et nos croyances. Mais la période est sombre.
Les GJ m’ont apporté de véritables liens d’amitié, une solidarité, l’importance du collectif une richesse intellectuelle, une détermination et du psoriasis et exéma dont je n’arrive pas à me débarrasser.
Mais surtout j’ai ouvert les yeux, ensemble on peut y arrivée à renverser ce système, il suffit d’une étincelle « On lâche rien ! ».
Camille
50 ans en 2018
– Pourquoi, quand et comment as-tu rejoint le mouvement ?
Je me suis prise pour Louise Michel,j’ai eu une envie de révolution populaire et la sous mes yeux se formait un mouvement qui partait de la base, je ne pouvais pas passer sans m’y plonger jusquà m’y noyer et que c’était bon, je l’ai rejoind tout d’abord sur le péage de Buchelay en rentrant à la maison après ma journée de travail au collège de la Vaucouleurs, puis on c’est donné RV sur le rond pount de Limay, Epone et nous avons fini à Buchelay .
– Quel était ton engagement dans celui-ci ?
De faire évoluer les revendications car honnêtement rien n’allait et c’est toujours le cas.
Nous étions un nombre qui grandissait de plus en plus sur les ronds points et les manifs à Paris, c’était l’extase de voire le mouvement se structurer, alors qu’il partait d’aucune orga syndical ni leader politique.
– Qu’est-ce qui t’a plu ou à l’inverse déplu dans les GJ ? Quelles étaient selon toi les forces et les faiblesses du mouvement ?
Les débats, l’avancé politique et les stratégies que nous menions ensemble pour visibiliser nos revendications la force que nous avions ensemble, le fameux bloc jaune…
– Quels sont tes souvenirs les plus marquants de cette période ?
Le jour ou Christophe Dettinger a enchainé des droites et des gauches aux CRS, quel plaisir d’assister à une partie de cette scène malgré les gazs lachés à mord je me souviens avec précisisons de ce début de moment, historique.
Le jour ou lors d’une manif sur Mantes la Jolie ma petite maman qui voulait nous rejoindre a été obligé de lever le ton face à un CRS qui ne voulait pas la laissé entrée dans le rassemblement, elle qui a tellement peure de la police, c’était géant, car elle est géante.
– Si c’était à refaire, tu ferais quoi pareil ou différemment ?
Plus déterminé, j’ai parfois été effrayé par toute la répression que l’Etat déployait pour nous faire taire, comme tous les mouvements de protestations populaires il est de coutume de lacher les chiens de gardes et peu importe le dégats, ce sont sans doute les fameuses victimes collatérales, ces arrestations arbitraires, ces mains arrachées, ces yeux éborgnés, ces traumatismes du au nassage, voltigeurs, violences verbales et physique des policiers, gendarmes, CRS… Mais il est vrai que je pensais à mes enfants et de me dire qu’un jour si je ne suis pas prudente, je risque de ne pas rentrer en train le soir même, la lutte c’est mieux lorsqu’on a pas d’attache…
– Quelles traces penses-tu que le mouvement a laissées, chez toi, en France, et pour ceux qui se battent pour changer cette société ?
De la haine… On a pas été jusqu’au bout, un gout de ne pas avoir fini le travail, on a pas su fédérer et pourtant on a fait du pied à tout le monde mais on devait sentir l’ail…
Évidemment, c’est anonyme, tu peux signer d’un pseudo, d’une seule lettre, comme tu veux !
Signée Aioli.
J’ai rejoint les GJ le 17/11/2018 lors d’une OP péage gratuit. J’y suis allé au départ pour rejoindre des amies, je n’étais pas au courant du mouvement. J’ai vu qu’il y avait beaucoup de ras-le-bol avec cette République. Jusqu’à fin décembre, j’ai fait plusieurs OP dans la région (péage, blocage PL [Poids Lourds] Renault, OP dans la grande distribution). Pour le moment c’était bonne enfant. Arrivé 2019, j’ai décider d’aller sur Paris et là l’hécatombe ds km de personnes à la manif du matin qui converger vers 2 autres manif l’après midi déterminé à ce faire entendre. Les flics étant débordé sa partait souvent en manif sauvage où il y a eu des dégradations (poubelles brulé, barrcadre etc). Plus de 10 à 15 km dans la journée. C’est la que j’ai vu la répression policiere mais la détermination des manifestant à « aller chercher notre chere président » comme il nous l’avez dit. Puis tous els samedi j’étais sur pas mal de manif (Paris, Rouen, Evreux). Le souvenir que j’ai au début c’était l’entraide, de la solidarité, de l’écoute. Ensuite ce qui m’a déçu c’est qu’il y a eu conflit en interne (guerre des égos, grosse médiatisation, des leaders alors que de base c’était un mouvement sans leader…).
Si je debait le refaire déjà sa serait des manifs non déclarée en mode action coups de poing comme dans certains pays. Faire tomber le gouvermenet demander la 6ème République et le FREXIT.
Après j’ai ouvert les yeux sur les merdes qu’on est sur la bouffe qu’on nous vend dans les centres commerciaux, les pourritures de nos gouvernements politiques etc. Le mouvement étiat un mouvement spontée en électron libre.
Ce mouvement sur la justice fiscal, écologique, justice social, ma montrée les incohérences.
Un anonyme
Suite au ras le bol accumulé (justice etc) depuis des années, spontanément j’ai rejoint les GJ dès le 17 novembre 2018.
Acte I seul je pars sur Paris, les champs élycées etc., dès 9h30 la ferveur et les tensions apparaissent. Les provinciaux sont tous bloqués à travers le pays pour limiter le nombre de participants. A0h ça y est on est tous gazés d’une façon inimaginable, sans raison la répression s’exerce sur le premier venu. Du ciel, tombe une véritable pluie de bombes assourdissantes, lacrymogène, flashball et la foule tente vainement de s’échapper sans y aprvenir en subissant le sort de la nasse durant des heures.
Aucune pitié pour les femmes âgées, les seniors, et qui ont tout enduré sous ce climat de guerre, j’ouvre les yeux : je vois des tapis de corps au seol inanimés suite aux gazage, cette image de guerre me restera gravée à jamais. J’ai occupé les R Pt comme les péages et cela reste une belle démonstration de fraternité et d’entraide de la part du peuple français. Certains pensaient que cela allait durer 3 mois, on y est encore… la force du mouvement : pas de leader, réactivité, solidarité, spontanéité.
Les faiblesses : une profonde méconnaissance des mécanismes du système, ou la victime choisit et nourrit son propre bourreau.
Si c’était à refaire : malgré les nombreux sacrifices oui sans hésitéer, pour un monde meilleur on a le droit rien que pour mes enfants !
Porte étendard
J’ai rejoint le mouvement en janvier. J’ai d’abord eu besoin de connaître avant de m’en rapprocher. Venant d’abord du milieu associatif écolo, j’étais à la fois fasciné par sa puissance spontanée et déconcerté des sujets de préoccupations initiaux qui semblaient aller à l’encontre de mes préoccupations écolos. C’est finalement après avoir échangé avec des connaissances anarchistes que je me décide à participer à mon premier acte avec eux. Le milieu militant me semblait alors dans l’incapacité à faire bouger significativement la moindre ligne. Cela m’a fait changer mes réflexions quant à où et comment mettre mon énergie. Moins prendre en considération les aspirations théoriques idéalistes mais plutôt rejoindre l’énergie là où elle est présente et participer à décupler son potentiel de changement radical.
Ce changement d’approche n’a clairement pas été partagé par un nombre non-bégligeable de mes connaissances écolos contribuant à élargir encore plus le fossé avec eux.
Ce mouvement était incroyable de bienveillance et de solidarité entre les GJ. Cela était particulièrement palpable dans les endroits emblématiques du mouvement comme les ronds point, les manif… mais également en dehors comme certaines anecdotes m’int été racontées : groupe de jeunes atirant l’attention des flics dans le métro pour éviter qu’un autre groupe de personnes âgées se fassent contrôler et ne puisse pas rentrer chez eux. Dans une perspective d’individualisation de la société, chaque acte spontanné de ce type redonnait de l’espoir en l’humain.
Il me semble que plusieurs éléments ont rendu difficile le prolongement du mouvement et ce qui le rendait si unique : spontanéité puissance et irrécupérabilité. La jonction avec d’autres milieux militants existants n’a pas pu aboutir. Cela aurait pu permettre au mouvement de contextualiser dans l’histoire ce qu’il avait réussi et de ne pas l’abandonner aussi abruptement qu’il n’avait commencé avec l’amertume et le sentiment d’avoir été « au front », alors que, petit à petit, l’opinion française, à cause des média dominants, abandonnait le mouvement. Cela a crée une grosse rancoeur envers ceux qu’i n’ont pas rejoint le mouvement. Sur les rond-point ou cabanes qui ont duré dans le temps, la saveur des coups de klaxons ds débuts n’avait plus grand chose à voir avec celle des mêmes coups de klaxons de soutien sur la fin du mouvement.
Sur les rond-point locaux, il a également fallu jouer de plus enplus avec les égaux de chacuns. La spontanéité et la chaleur des débuts laissait de plus en plus place à des tensions entre petits groupes. La confiance donnée spontanément au début à chacun est devenue difficile à retrouver lorsque celle-ci a pu être perdu à telle(s) ou telle(s) occasions ou bien lorsque des soupçons s’immisçaient (parfois via des dires des flics invérifiables).
Aujourd’hui le mouvement n’existe plus en tant que tel mais a bien sur laissé de nombreuses traces, notamment dans l’imaginaire collectif. Localement plusieurs petits groupes ont tenté diverses choses. On peut nommer la distribution gratuite à plusieurs dizaines de familles de légumes invendables d’un maraîcher bio. Certains se sont éloignés pour trouver des endroits plus accessibles à la campagne pour recommencer une vie plus dans leurs aspirations. D’autres ont repris un ancien corps de ferme pour le gérer sous forme associative.
Il me semble qu’une très large partie des GJ seraient prêts à recommencer ou à rejoindre un mouvement futur aussi radical, à la différence prêt qu’ils ne seront pas à l’initiative ou à la première heure. Cette rancoeur est encore très tenace envers ceux qui les ont abandonnés. Tout comme il est probable que d’autres mouvements acutals ou pré-existants aux GJ le ressentent également : sans papiers, racisés victimes de violences politicières…
Katan
Gilet jaunes dès la deuxième semaine du mouvement social, j’ai rejoint le péage de Buchelay où régnait la bonne humeur et la convivialité qui a perduré des mois durant.
J’ai rejoints ce mouvement car j’ai eu la sensation qu’enfin les gens se bougaient et que je devais en être. Je ne sais pourquoi, peut être le nombre de personne, le bruit fait par les médias… mais j’étais persuader qu’on était au début de quelque chose d’important et que je devrais faire ma part.
J’allais en manifestation sur Paris du samedi, je participais à l’ouverture des différents péages, l’ouverture des barrières des hôpitaux, les manifestation en soutien des grévistes : pompiers, infirmier, chaminaux… rond point + baraquements, distribution de flyer, blocage d’usine, regroupement devant les prisons, réunion GJ ile de France sur Paris, RIC… Tout c’est moment passer à s’organiser, militer, revandiquer, réfléchir aux différents mode opératoire pour bousculer ce gouvernements m’ont donner le sentiement que tout était possible, que la société pouvait changer et j’y ai mis tout mon énergie.
Des souvenirs j’en ai plein, des fabuleux comme de j’en revivrais certainement jamais et des malheureux comme je n’aurais jamais pensé vivre. Une prise de conscience violente auquel je n’avais jamais fait face car je n’avais jamais militer avant ce mouvement. je ne soupsonnais pas la discipline et le manque d’analyse que pouvait avoir la police. Je n’avais pas conscience que l’obéissance aveugle et le manque de discernement régnait dans leur rangs.
Et l’information détourner, transformé des medias me rendais folle.
La première fois que j’ai réalisé qu’il y avait un reel problème avec la police c’est lors de ma deuxième manifestation, l’acte IV. J’étais avec une amie qui militer pour la premiere fois, nous nous étions égarés dans uen rue plus calme près des champs élysée quand surgie un camion et qu’en descende plusieurs personnes cagoulés habillé entièrement de noir qui se sont dispercé très rapidement dans les rues adjacente.
Nous nous sommes demandés qui cela pouvait être. Nous en avons suivies un et il s’est mis à cassé des vitrines. Nous nous sommes donc éloigner. Comme je l’ai dit je ne connaissais pas cet univers, je n’avais jamais entendu parler de casseurs, de black block ou autres.
En fin de journée, fatiguée, alors que nous nous apprétions à partir, dans une rue déserte nous avons recroiser ces hommes en train de discuter tranquilement avec les CRS. Nous avons bien eu du mal à analyser et comprendre cette situation. La suite de l’histoire de ce que je vivrais dans ce mouvement me permettra de réelement certifié ce que je venais de voir.
Ce monde, ce jaunes partout, dans toutes les rues, les jeunes, les personnes âgées, tous unis, était porteur d’espoir, cette fraternité, cette entraide, cette convivialité, les chants, les danses, ces sourires, je ne les oublirai pas.
Les forces de l’ordre ou celle du désordre, anciennement gardiens de la paix (ça en dit long…).
Les premiers tirs de flashball viennent, les premiers blessés. L’une de mes scènes les plus marquantes c’est dans un grand boulevard un CRS qui vise la hauteur de ma tête à une vingtaine de mètre de moi. Je ne comprends pas la scène, révolté je m’approche de lui et lui hurle dessus «Vous faites quoi ? Vous me visez ? Je vous fait peur ? 1m60, 60 kg vous vooyez que j’ai rien même pas de sac.» Un ami arrive en courant et me tire par le bras et m’emmène plus loin, il m’explique que maintenant il nous tire dessus. J’ai bien du mal à le croire. J’apprendrai aux informations du soir que la bienveillance de cette personne m’avait certainement sauvé.
Ria
Des extraits de ces témoignages, accompagnés d’autres tégmoignages de GJ d’ici et d’ailleurs, d’un historique détaillé du mouvement et d’un dossier analytique, ont été publiés dans le mensuel Courant Alternatif 346, janvier 2025