Article du journal libertaire « Le Balai Social, Tribune libre à tous les protestataires de l’Arrondissement de Mantes », N°1, 15 décembre 1904
POÉSIE
Le Bourgeois ? c’est… une machine,
Qui tourne mais ne produit rien,
Chacun de nous pourtant s’échine,
Pour assurer son entretien.
Les Bourgeois ? c’est…un ventre immense.
Que nous gavons de notre mieux;
Nous travaillons pour qu’il dépense
Que le bourgeois est donc heureux !
Il est maître en République.
Il l’était sous la royauté,
Il dit de nous : la sale clique.
On le choisit pour député.
Malgré ses vols, malgré ses crimes,
On applaudit l’audacieux;
Il est béni par ses victimes:
Que le bourgeois est donc heureux !
Ce ver rongeur, cette crapule.
Peut vivre sans le moindre effort,
Le bourgeois n’a pas de scrupule,
Il a pour cœur un coffre-fort,
Avec nos sous il fait ripaille.
C’est bien son droit, disent les gueux
Qui n’ont pour lit qu’un peu de paille :
Que le bourgeois est donc heureux !
La faim fait que dans les usines,
On se vend au dieu capital;
Par mille on meurt au fond des mines
Les autres vont à l’hôpital.
Le bourgeois vole, le bourgeois pille!
Il nous prend tout, c’est merveilleux !
Si l’on proteste on nous fusille:
Que le bourgeois est donc heureux !
Nous n’oublions rien pour lui plaire,
Ses châteaux? nous lui bâtissons;
Il faut payer en locataire
Les taudis que nous construisons.
Nous lui faisons casernes, églises,
Protégeant ses droits odieux
Conclusion de… nos bêtises:
Que le bourgeois est donc heureux.
Ce fainéant, ce vilain drôle,
Qui mange et dort dans des palais,
Ne peut vraiment remplir qu’un rôle,
C’est de fournir beaucoup d’engrais.
Pour lui donner tâche facile,
Exproprions ce paresseux,
En supprimant cet inutile:
Les travailleurs seront heureux.
PERRON [nom incertain, orthographe difficilement déchiffrable]